Naël regardait le soleil plonger dans l’eau. Les vagues caressaient les plantes de ses pieds d’un doux clapotis. Des chants d’oiseaux courraient dans l’air. Des oiseaux, ces animaux mythiques ! Naël ria doucement. Le ciel changea rapidement de couleur passant d’un orange chaleureux à rose pâle puis violet sombre. Quelques points scintillants piquetaient la nuit. Et dire qu’il y a des milliers d’années de distance, des êtres humains comme lui avaient regardé le même ciel du même endroit.

Les ruines cachées dans la jungle attestaient de la présence d’une civilisation ici, au bord de la mer. Les fouilles avaient montré que des choses pas très jolies jolies s’y étaient déroulées. Il soupira. C’était la longue malédiction des humains et elle avait commencé ici, sur cette planète.

Un craquement le fit se retourner, maser en main.

― C’est moi, capitaine.

Il reconnut la voix de Xiafi dans le noir. Il baissa son arme. Vu les bêtes qu’ils avaient eu l’occasion de croiser sur cette Terre laissée à elle-même, il préférait être vigilant.

― Artur m’envoie te chercher, il semblerait que Linor soit arrivé à capter quelque chose avec son bricolage.

Naël et le jeune s’enfoncèrent dans les bois moites. Ils rejoignirent leur vaisseau qui s’était posé sur une place de la ville fantôme, encerclée par des tours vides et brisées. Des arbres tenaces avaient poussé dans les bâtiments et saluaient la place à travers les fissures dans les murs.

Ils trouvèrent les hommes devant un écran antique récupéré lors de visites de certaines des tours. Linor avait passé des jours à farfouiller dans des fils, à grimper dans les hauteurs accrocher des antennes de fortune et à souder des composants étranges ensemble. La jungle n’était pas son truc. Du son sortait d’enceintes bidouillées.

― … auras de l’aide quel que soit l’endroit où tu te trouves. Rejoins-nous. Faisons tomber ensemble ce système inique…

Naël n’écoutait que d’une oreille distraite. Son regard restait bloqué sur une des femmes du groupe, en arrière-plan. Elle écoutait attentivement sa voisine masquée, penchée tout contre elle. De longues tresses encadraient son visage fatigué et froid. Son manteau rouge était un peu défraîchi. La femme leva ses yeux noirs vers la caméra et le cœur de Naël bondit dans sa poitrine. Il détourna les yeux et croisa ceux moqueurs d’Artur. Il reprit son masque de capitaine.

― … pas libres tant qu’une autre personne est enchaînée. Nous voulons la liberté pour toutes et tous, pas uniquement pour quelques-uns. Rejoins-nous et libérons-nous, ensemble. Car nous sommes des milliards et ils sont peu.

L’image fut remplacée par un grand cercle barré et Naël devina un oiseau aux ailes enflammées en bas de l’écran, puis un grésillement et le décor du journal en continu fit son retour. Le présentateur lut méthodiquement le prompteur à l’écran :

― Messieurs, nous nous excusons de la gêne occasionnée. Des terroristes financés par l’Empire Unioniste ont piraté notre chaîne. Notre armée intérieure fédérale a pu rétablir l’ordre et des premières arrestations sont en cours. Nous vous tiendrons au courant de l’avancée de l’enquête. Et maintenant des nouvelles du front…

Linor baissa le son pendant que l’équipage lâchait leur trop plein d’excitation :

― C’était pas le Loup d’Argent à gauche de la porte-parole ?

― Elle n’est pas mal la jeune avec le haut orange, non ?

― La petite a l’air dans son élément, ça fait plaisir à voir.

― Mais pourquoi les gens sont masqués, c’est bizarre non ?

― J’ai du rhum les gars, on va fêter ça !

― Mais il n’y a rien à fêter, Issam ! Ne gâche pas les réserves.

― Vieux grincheux, va… tiens, prends ton verre et tais-toi !

Les mousses riaient des pitreries d’Issam sous l’œil réprobateur de Saelys. Les jumeaux étaient collés l’un contre l’autre. Artur, Mizsel, Mazziek et le Doc’ étaient en grande discussion sous l’écoute attentive de Zakioru.

Naël passa la main dans sa barbe. Elle commençait à être longue. Ça ne leur ferait pas de mal de retourner à la civilisation. Ils avaient récupéré assez de reliques anciennes pour faire bonne fortune quelques temps.

Il leur faudrait au plus une semaine pour les préparations. Puis un long voyage de retour. Six mois IG au mieux. C’était loin, la Frontière.

Naël leva son verre :

― A l’Arcadie, à l’aventure, à la liberté !

***

Eh ! voilà, le dernier chapitre de cette aventure. J’espère que pour les gens qui ont tenu jusqu’ici ont apprécié le voyage au bord de l’Arcadie

Rétrospectivement, je constate un certain nombre de points d’amélioration, notamment de structures, de rythmes, d’univers et d’angles d’approche.

Bon, ok, de pas mal de choses en fait.

Mais je reste fière de ce que j’ai écrit. Peut-être qu’un jour que je reprendrai ce roman du début. Qui sait ?