L’article original étant beaucoup un poil long, je l’ai scindé en deux parties. La deuxième partie sera publié la semaine prochaine.

Les images illustrant cet article sont des pancartes vue lors d’un rassemblement contre les violences sexistes et sexuelles.

Attention : cet article aborde les thématiques de violences sexistes et sexuelles, notamment sur mineur·e·s.

J’en profite pour rappeler trois numéros à connaître absolument, que je peux appeler si je suis en danger ou en risque de l’être, ou si je connais une personne en danger :

  • 3919 : pour trouver écoute et soutien pour toute femme victime de violences
  • 0 800 05 95 95 : pour trouver écoute et soutien dans les démarches suite à un viol ou une tentative de viol
  • 119 : lorsqu’un enfant est en danger ou en risque de l’être

J’avoue avoir eu envie de mettre aux oubliettes cet article. Le glisser dans la corbeille de mon bureau virtuel. La période est assez déprimante pour ne pas vouloir en ajouter, entre le confinement, les attentats, la précarité en embuscade pour beaucoup, l’incompétence crasse de notre gouvernement, les lois autoritaires et la luminosité naturelle qui diminue.

Mais voilà, j’ai une question qui tourne et tourne dans ma tête : pourquoi personne, hors du monde féministe, ne s’indigne contre la terreur imposée aux femmes par la classe des hommes ?

Cette terreur massive qui fait plus d’une centaine de mortes par an et qui marque toutes les femmes dans leur chair.

« Pardon de déranger mais on nous viole »

De la nécessité de comprendre

Je ne suis pas une spécialiste du terrorisme islamiste, loin de là. Mais je suis toujours étonnée par la réduction d’un phénomène complexe comme des actes terroristes à un énoncé (erroné) du type « les musulmans sont méchants ». Le fait que des personnes ayant grandi en France et se revendiquant d’une entité politique néofasciste puissent tuer ou tenter de tuer d’autres personnes vivant en France méritent mieux qu’une explication de ce type. Les grands médias ne diront rien sur les motivations idéologiques, l’embrigadement de type sectaire, la précarité, le passé colonialiste, la géopolitique, les normes de la masculinité, et sur d’autres analyses permettant d’éclairer les différentes facettes du phénomène. De le comprendre pour mieux éviter le passage à l’acte.

On remarquera de plus que, lorsque un blanc, vivant en France et se revendiquant d’une entité politique néofasciste, essaye de tuer d’autres personnes vivant en France, l’explication type devient : « c’est l’action d’un déséquilibré ».

« En lutte contre les violences sexistes & sexuelles »

Des lois liberticides

Et sous couvert de lutter contre ces actes terroristes, on nous pond un état d’urgence temporaire devenu permanent, des enfants placés en garde à vue pour avoir dit de la m***e et la toute dernière loi sur la sécurité globale (rien que ça), qui permettra (entre autres) de limiter fortement la diffusion de violences policières et d’autoriser des hommes à porter des armes dans nos rues, alors qu’ils ne sont pas ou plus en service. Avec pour résultat une belle montée de racisme.

Notre sang est rouge, notre colère est noire

Le silence des mortes

Mais, sur le terrorisme patriarcal, rien, ou si peu. Oh , un mieux est notable. Il n’est plus possible de faire semblant de ne pas savoir, après la vague « Me too ». Ce n’est pas rien. C’est même énorme, après des années et des années de silenciation des femmes et de redécouvertes permanentes de l’ampleur du massacre. Et c’est grâce au courage des femmes qui ont témoigné et aux associations et militantes féministes qui ont continué inlassablement à dénoncer ces violences, comme le Collectif Féministe contre le Viol, le réseau Solidarité Femmes, le plus récent collectif le Groupe F devenu Nous Toutes, etc.

« Pour les douleurs et le sang, on a déjà nos règles »

Petit aparté personnel : c’est la campagne « La honte de changer de camp » des associations Mix-Cité et Osez le féminisme ! qui m’a ouvert les yeux sur ce sujet. Elle date de… 2011. Cette campagne n’est pas non plus sortie de nulle part, et se base sur le travail d’associations féministes comme le Collectif Féministe contre le Viol (créé en… 1985), sans parler des campagnes la précédant, que je ne connais malheureusement pas.

« Sauvons le 3119 ». Le 3919 est actuellement tenu par le réseau féministe « Solidarité Femmes », mais notre cher gouvernement veut créer un appel d’offres pour la gestion de ce numéro, avec le risque d’une dégradation de la prise en charge des femmes.

Des chiffres sur les violences sexuelles

En France, de 2012 à 2019, 263 personnes ont été tuées dans des attentats à revendication islamiste. Nous pouvons dénombrer le même nombre de femmes assassinées par leur conjoint et ex-conjoints sur les deux dernières années : 146 tuées en 2019, 121 en 2018. Ces chiffres évoluent peu : en 2009, 140 femmes.

Cela m’attriste de citer des statistiques ainsi. On oublie si souvent que derrière les nombres nous parlons de vies humaines, de personnes avec leurs espoirs, leurs doutes, leurs erreurs, leurs failles, leurs amours…

« Je t’avais dit que le 1er mari de ta grand-mère la battait. Mais la vérité, c’est que ton grand-père aussi. Plus elle protestait, plus il la battait fort. Et malgré tout, j’ai toujours pris la défense de ta grand(mère, à chaque fois je m’interposais. Protégeons les mères et leurs enfants. »

Une personne tuée est un meurtre de trop.

Un viol est un viol de trop.

Mais voilà, en France, 150 femmes de plus de 20 ans sont victimes de viol par jour. Il s’agit d’une estimation basse, car elle ne prend pas en compte les femmes de plus de 70 ans et les viols pour lesquels les victimes n’ont pas encore mis les mots sur l’acte imposé.

« 8% des victimes portent plainte. 70% des plaintes sont classées sans suite. 1% des violeurs sont condamnés. Stop culture du viol »
85% des personnes prostituées sont des femmes. 6 fois plus de viol chez les personnes prostituées que dans la population générale. 51% des personnes prostituées ont subi une ou des violences physiques ces 12 derniers mois

Et chez les moins de 18 ans ?

Il n’y a pas d’enquêtes spécifiques concernant les violences sexuelles sur mineur·e·s. Cependant, il ressort des différentes études que la majorité des viols et tentatives de viols (59 % pour les femmes et 67 % pour les hommes) ont lieu avant la majorité.

Il voulait me baiser, j’avais 10 ans

Et les autres types de violences ?

En France, presque une femme sur cinq est victime de violences sexuelles au cours de sa vie. Cette estimation ne prend pas en compte les victimes d’exhibitions et harcèlements.

Cette femme sur cinq, c’est moi.

C’est peut-être ma sœur, ma mère, probablement ma grand-mère, mes amies, mes collègues.

C’est peut-être vous.

« 8 ans. 11 ans. 9 ans. Un enfant n’est jamais consentant. »

Les violences sexuelles ne sont pas le seul type de violence dont sont victimes les femmes. Elles vont de pair avec d’autres formes de violences : verbales, psychologiques, physiques, économiques, administratives (pour les femmes étrangères), sur animaux. De plus, une femme pourra connaître plusieurs types de violences au cours de sa vie. C’est ce que l’on appelle le continuum des violences.

De plus, il existe des différences notables entre les catégories de femmes. Il est important de prendre en contre l’imbrication des différents systèmes de domination si l’on souhaite lutter efficacement contre ces violences. Par exemple, les femmes en situation de handicap sont 76 % à subir des violences au long de leur vie, contre 37 % pour les femmes qui ne le sont pas. Les femmes lesbiennes non plus ne vivront pas forcément les mêmes types de violences patriarcales.

Dans le second article, je parlerai des agresseurs, de l’impact de la peur et de pistes féministes.

Pour aller plus loin :

Terrorisme :

Sur les lois liberticides :

Des chiffres sur les violences patriarcales :