L’Arcadie traversa les portes spatio-temporelles les unes après les autres sans que les faux papiers de Yuredig ne posèrent de problème. La dernière porte traversée, le vaisseau n’était plus qu’à quelques heures de l’astéroïde prisé par les fêtards et noceurs de toutes sortes. Naël connaissait l’endroit de réputation, un des rares lieux de liberté encadrée, coincé entre une Fédération autoritaire et un Empire guerrier. Tout était permis, tant que l’on alignait les Feds sur la table. Une soupape parfaite pour une jeunesse argentée et désœuvrée.

Naël aperçut enfin l’astre de la cabine de pilotage. Son diamètre faisait à vue de nez moins de dix kilomètres. Sa surface était recouverte de hangars de toutes les couleurs, comme le grand marché d’épices de la ville de son enfance. Il sourit en repensant à ses premiers larcins avec sa bande, les rêves d’aventure, les poches allégées des nobles venus s’encanailler sur sa planète et les courses poursuites entre les étaux.

Issam suivit les clairances de la tour de contrôle et le vaisseau atterrit sans dommage dans l’astroport, qui formait un trou noir dans la couche chamarrée des bâtiments. Tous les deux sortirent de la cabine rejoindre le reste du groupe patientant devant le sas de sortie.

Naël avait donné sa journée à l’ensemble de l’équipage, ses hommes avaient peu l’occasion de dépenser leur solde dans un lieu si vivant. Même Linor aurait tout le temps d’en profiter, après avoir envoyé la requête de la sorcière au hacker.

Tous les hommes s’étaient mis sur leur trente-et-un. Ils ne s’en sortaient pas trop mal, pour des gaillards plus habitués à prendre d’assaut des vaisseaux marchands qu’à enflammer le dancefloor. Gaillards car Yuredig, ou plutôt Yuka, s’était affublée en homme, avec son blouson en cuir, son pantalon, son T-shirt noir et sa ceinture rouge qu’elle avait trouvée Naël ne savait où. Pas que cela lui allait mal, elle ressemblait à un jeune mignon. Mais ce n’était pas là l’accoutrement d’une femme de bonne tenue, et encore moins de sa femme, même pour de faux.

Yuredig – Yuka devait trouver ce fameux contact ce soir. Artur et lui avaient prévu de la coller comme une ombre pour éviter toute surprise désagréable, comme une fuite par exemple.

Le groupe zigzagua entre de multiples vaisseaux, de toute taille et de tout type, avant d’atteindre les hangars qui formaient l’astroport. Leurs pas étaient légers grâce à une gravité artificielle un peu en dessous de celle du vaisseau. De grands hologrammes barraient le couloir, superposés les uns derrière les autres :

« Soyez le roi de votre nuit »

« Le meurtre est un délit »

« Le vol est un délit »

« Tout délit vaut condamnation à vie »

« Profitez ! La vie est si courte »

Au moins, les règles étaient claires. Quelques picotements parcoururent la peau de Naël quand le groupe traversa les messages. Les hommes arrivèrent enfin jusqu’au sas d’identification.

Au grand étonnement de Naël, aucun papier ne fût demandé. Cependant, ils eurent tous droit à une fouille approfondie et le capitaine grimaça sous le regard irrité de la sorcière quand un gardien sortit un troisième couteau de ses bottes. Il tenta son plus beau sourire ; le gardien, en habitué, resta de marbre. Naël n’aimait pas se promener nu, comme il expliqua à son second.

Le rendez-vous était prévu en début de soirée dans une boite de nuit appelée Henritris. Naël, Artur et Yuka avaient toute l’après-midi devant eux et décidèrent de traverser la ville à pied. En sortant du hangar, Naël s’arrêta de surprise. De l’étonnement était aussi percevable sur le visage de son second, du moins pour ceux qui le connaissaient bien. Naël le comprit sans peine, car il n’avait rien vu d’aussi étrange depuis un bail.

Le plus remarquable était l’accoutrement des personnes qu’ils croisaient. Naël avait dû louper dans le hangar la règle obligeant le port de tenue tapageuse : plumes, zébrures, strass et paillettes, bras multiples, traînes longues, décolletés faramineux, oreilles de chat, yeux à laser… Même les personnes qui paraissaient de loin sobres avaient une touche de bizarrerie vue de près, comme une barbe fournie pour de très belles femmes en tenue moulante. Les barbues n’étaient pas trop son truc, malgré leur silhouette appétissante. Cette étrangeté poussait à oublier qu’une menace pouvait se cacher dans chaque ombre. Il porta d’instinct la main à sa ceinture, mais n’attrapa que du vide. Il était bel et bien nu.

Le décor n’était pas en reste. Des sortes de petits félins aux plumages improbables voletaient entre les discothèques qui s’alignaient sous un faux ciel aux reflets violets. Des lierres grimpaient sur des pans de murs, tandis que des fleurs aux odeurs lourdes poussaient dans les coins. Des balançoires en lianes bleues, vertes, jaunes, rouges, descendaient du ciel et se balançaient sous une légère brise. Le tout était d’une propreté satisfaisante grâce à des petits drones ronds et à roulette qui ramassaient les déchets jetés au sol. Naël en attrapa un par la pince pour l’étudier de plus près. Le drone cliqueta d’indignation et menaça l’homme de sa pince libre. Dommage, ces robots n’avaient pas l’air adaptés à la vie en vaisseau. Naël le reposa au sol sous le regard agacé de Yuka.

Le petit groupe s’éloigna de l’astroport. Le soleil artificiel baissait dans le ciel pendant que le décor perdait son air d’île paradisiaque pour revêtir des tournures plus électriques. Des néons multicolores s’allumaient aléatoirement, des hologrammes pulsaient suivant le rythme de la musique des discothèques les plus proches. Naël aperçut dans les coins les moins éclairés des silhouettes recroquevillées, probablement droguées, mais aussi des groupes à moitié dévêtus agglutinés et haletant. Il se détendit, il n’y avait pas de mal à se faire plaisir et Naël avait peu de chance d’être égorgé par un orgiaque.

Le groupe marcha encore une heure, peut-être plus ou peut-être moins, le temps ne semblait pas avoir la moindre emprise ici, et traversèrent encore un lac, un bosquet de peupliers en argent et une place transformée en patinoire.

Ils trouvèrent enfin le Henritris, un énorme bâtiment en pierre à colonnade. Ils tracèrent leur passage au milieu de la piste de danse bondée et s’assirent au bar. Yuka fit signe à au barman :

― La gardienne des lieux de la part de sa sœur en rouge.

Ils commandèrent ensuite à boire. En attendant, Naël observa les danseurs et fêtards plus excentriques les uns que les autres. Son regard s’arrêta sur une très belle femme de l’autre côté du bar qui les fixait. Elle était entièrement bleue : sa peau était bleu ciel, ses cheveux bleu électrique et sa robe bleu nuit laissait deviner une silhouette sinueuse. Elle se leva et avança vers eux d’une démarche souple. Depuis combien de temps n’avait-il pas eu la compagnie d’une femme ? C’était son jour de chance.

― Tu as du feu ?  demanda la femme en fixant Yuka, au grand désarroi de Naël.

La femme avait les yeux du même bleu électrique que ses cheveux. Yuka lui tendit son briquet et alluma la cigarette avec un sourire en coin. Naël se tourna vers Artur en soulevant un sourcil qui lui répondit par un fugace sourire moqueur. Il n’aimait pas qu’une belle femme l’ignore à ce point, encore moins pour une personne littéralement plus efféminée que lui.

― Tu veux passer la soirée avec moi ?

― Je ne pense pas posséder tous les attributs pour te satisfaire, ma belle, répondit Yuka avec des yeux rieurs.

― Oh si, tu as tout le nécessaire.

Yuka pencha la tête sur le côté avant de répondre, une pointe de regret dans la voix :

― J’ai un rendez-vous important ce soir.

― J’ai confiance, tu trouveras bien un moment pour moi, je reste ici toute la soirée. A tout à l’heure.

Et la femme océan partit de sa démarche ondulante se perdre au milieu de la foule dansante.

Encore sous le choc de cette présence, Naël mit du temps à voir que le barman leur faisait signe de l’accompagner. Ils se levèrent et le suivirent jusqu’à une porte derrière le bar qui donnait sur une grande pièce vide et silencieuse au carrelage noir et blanc. La musique assourdissante de la piste de danse semblait n’avoir été qu’un mirage. Au fond, se trouvait un escalier en marbre qu’ils montèrent. Ils traversèrent un labyrinthe de couloirs sans que Naël n’arrivât à comprendre comment les architectes avaient réussi à caser autant d’espaces inutiles. Enfin, leur guide ouvrit une porte en les invitant à entrer.

La pièce était grande et pleine de tables et de chaises rococos. Des hologrammes sur les murs représentaient des scènes de chasse et des divinités batifolant dans des bois. Des teintures ondulant sous une brise invisible bordaient des fenêtres virtuelles aux paysages fantasques. Une femme les attendait, attablée au milieu de la salle et un verre de vin à la main. Quand elle les aperçut, elle se leva, resta quelques secondes pétrifiée avant de se précipiter prendre les bras de Yuka en l’asseyant de force. Un flot de paroles se bouscula de sa bouche pendant que Yuka serra les mains fines dans les siennes. Les mots se réverbéraient sur les murs.

― Oh mon dieu, petite sœur, tu as tant maigri. Cela fait quoi, quatre longues années ? Je suis tellement, tellement, tellement désolée de ce qui t’est arrivé. J’ai appris pour Aurore et pour ton équipage, un massacre d’une cruauté ignoble. J’étais si inquiète pour toi. Je n’ai rien pu faire pour ton navire. Il a été mis au rebut, j’en avais les larmes aux yeux quand je l’ai su. Un vrai gâchis.

C’était une femme très belle, dépassant Yuka d’une bonne tête, aux cheveux ondulés blond platine, à la peau claire et aux yeux verts, pleine de courbes généreuses à croquer. Une beauté classe et froide qui tranchait avec le charisme de prédateur de Yuka. Où des femmes aussi différentes avaient bien pu se rencontrer ?

Artur se pencha vers lui tout en lui murmurant :

― C’est Oneza d’Auclert, la femme du sénateur.

Son nom disait quelque chose à Naël, il semblait l’avoir déjà entendu dans les émissions people qui passaient dans certains bars d’astroports. Une de ces fameuses femmes du gratin, donc. Ce qui le questionna encore plus. Artur avait vu juste sur le soutien richard. Comment une ancienne esclave avait pu rencontrer une femme de la haute ?

La femme continua son monologue sous l’air amusé de Yuka :

― Oh, mais tu t’es coupé les cheveux…

Elle replaça quelques mèches rebelles sur le front de Yuka.

― J’ai l’impression de te revoir quand tu étais mousse. Ça te va bien, tu ressembles aux jeunes amants de mon mari. Mais bon, je trouve que les cheveux longs te vont mieux.

Naël décida de couper court aux retrouvailles à l’effusion toute féminine :

― Moi aussi, je lui préfère les cheveux longs.

La sénatrice se tourna vers eux.

― Oh, mille pardons, je vous ai complètement oublié sous le coup de l’émotion, ria-t-elle en tendant la main vers eux.

Son regard froid et sa poigne ferme contredisaient le ton de sa voix.

― Je manque aux règles élémentaires de bienséance. Enchantée, monsieur Kalozka, monsieur Durolis, je suis Oneza d’Auclert. Oh, ne faites pas cet air étonné, vous avez votre petite réputation tout de même, minauda-t-elle. Les amis de mon Azza-chérie sont aussi mes amis. Asseyez-vous, asseyez-vous, et prenez un verre.

Un silence s’installa quand la femme remplit leur verre de vin. Sous le regard des deux hommes, Yuka et Oneza en burent une gorgée.

― Très bon choix, grande sœur.

― Bien, maintenant que vous avez pu constater que la boisson n’était pas empoisonnée, commença Oneza, je vous invite à ne pas gâcher une si chère bouteille et d’en venir au fait.

Directe, comme femme.Cela faisait un point commun avec Yuka. Il cala ses longues jambes devant lui et dégusta le vin. Un Chasi. Pas mal, la richarde ne faisait pas les choses à moitié. Il se resservit en un geste lent :

― En résumé, après avoir sauvé notre amie commune, ici présente, d’une fin peu glorieuse sur une planète froide à la noix, nous avons passé un pacte. Pour ce pacte, nous avons besoin d’une somme d’argent conséquente, que vous pourriez nous avancer.

Oneza se tourna vers Yuka d’un air interrogatif.

― Je veux retrouver celle qui m’a trahie, grande sœur, répondit Azza d’un air détaché. Elle est responsable de la mort de mon équipage, de celle d’Aurore et de la destruction de mon navire. Je veux lui demander pourquoi.

― Cela ne t’apportera rien, petite sœur, à part la souffrance. En revanche, je peux t’aider à repartir, si tu le souhaites.

Artur posa sa main sur le bras de Naël pour l’empêcher de répondre.

― J’ai passé un pacte, grande sœur. C’est mon honneur qui est en jeu.

― Tu sais ce que je pense de l’honneur, riposta Oneza. Cela enchaîne les gens à des promesses qui ne tiennent qu’avec du vent. Il faudrait être idiote pour s’attacher à quelqu’un pour une chose aussi peu fiable que l’honneur, surtout à des hommes qui ne sont pas connus pour en avoir. Oh oui, car je connais votre parcours, messieurs. Condamnation pour haute trahison par l’armée que vous serviez, ennemie à la mienne, monsieur Kalozka, et pour vous monsieur Durolis, emprisonnement pour désertion de notre chère légion en plein combat, pas très honorable comme geste.

Le visage de Naël se crispa de colère. Artur affermit sa prise sur le bras de Naël.

― Oneza, ne pousse pas le bouchon trop loin. Ces hommes ont pris des risques et défier la Fédération pour sauver ma peau. Tu ne sais pas ce que c’était d’être dans cette cage. C’était pire que la mort, grande sœur… C’était… comme le dortoir la nuit, mais seule. Et pas que la nuit.

Des émotions multiples passaient sur le visage de la rebelle, des ombres de colère, de peur et de la tristesse. Yuka serra la main de sa vieille amie :

― Oneza, je veux comprendre pourquoi. Je ne pourrai avancer que lorsque j’aurai compris pourquoi. Pourquoi cette femme a fait cela. Pourquoi elle a trahi sa famille. Tu sais, notre accord ne tenait aussi que sur du vent. Pourtant, il s’est montré vrai et fort, et s’est solidifié avec le temps. Fais-moi confiance, encore une fois. Donne-nous une chance.

La sénatrice fit tourner de sa main libre le liquide rubis dans son verre de longues secondes avant de répondre :

― Azza, tu as raison. Nos liens sont plus solides que du vent. Messieurs, je n’aime pas me répéter, mais vous faites le moindre coup tordu, je vous empêcherai de faire vos petits recels même dans les coins les plus retirés de notre Fédération.

― Madame, votre confiance nous fait chaud au cœur, répliqua sarcastiquement Naël.

― Merci, grande sœur.

Yuka se leva, chuchota de longues phrases à l’oreille de la sénatrice. Seuls des murmures aux consonnes roulantes parvinrent aux deux hommes. L’ancienne rebelle se retourna enfin vers eux, toute émotion chassée de son visage :

― Je vous abandonne. J’ai une sirène à attraper. On se rejoint au navire.

Et elle passa la porte de sa démarche souple. La sénatrice replaça sa coiffure parfaite d’un geste gracieux :

― Je vous laisse régler les menus détails avec mon assistant. J’ai à faire de mon côté. Adieu, messieurs.

Elle quitta la salle laissant les deux pirates avec un homme austère et gris, entre deux âges, qui s’était glissé silencieusement à la table.

L’homme était un vrai roc, pinaillant sur des détails, des tournures de phrases, sur l’inflation de l’index galactique liée à la piraterie frontalière. Naël et Artur durent déployer leur ballet de persuasion, affiné par l’expérience et une confiance construite par des années de travail ensemble. A force d’éperonnage, glissades, faux refus et réels murs, flatteries et insultes, ils réussirent à obtenir une somme suffisante pour faire largement face à leur dépense à venir, somme qu’ils recevraient chaque semaine par le biais d’une crypto-banque ayant un comptoir dans les principaux astroports.

― Un vrai vampire, persifla Naël en regardant l’homme s’éloignant en glissant.

Les deux arcadiens sortirent à leur tour. La nuit artificielle s’éclaircissait à l’horizon et le ciel se striait de raies vaporeuses vert pâle.

― Cela nous a pris plus de temps que prévu. On va pas pouvoir profiter des fleurs offertes par ce caillou fou. Pas trop déçu, Artur ? dit-il rêveur pendant que des femmes nues et recouvertes de peinture leur coupèrent la route en courant.

Leurs éclats de rire se répandirent en écho sur les murs avant d’être recouverts par la musique emplie de basses qui se déversaient à travers les portes des boites de nuit.

― Oh, tu sais, il n’y a que des jeunes ici et j’évite les jeunes. Je trouve les nuits plus plaisantes avec un homme mûr, qui a connu la vie et qui se connaît soi-même. Il y a moins de mauvaises surprises, moins de compétition, moins de virilité en jeu, répondit le second de son sourire de vieux filou.

Naël secoua la tête, chassant les images de son second avec un bel homme d’âge avancé.

― C’était du Ralong, non ?

Artur ne sembla pas surpris du changement de sujet. C’était une des raisons pour lesquelles il appréciait plus que tout son quartier-maître. Ils n’avaient pas besoin de tergiverser des heures pour se comprendre.

― Oui. Cependant, ces dames parlaient trop bas pour que je puisse saisir leurs échanges.

― Elles étaient donc esclaves toutes les deux. Comment une ancienne esclave a pu se démerder pour épouser un sénateur ? Elle a dû utiliser une sorcellerie de femmes… Ou elle baise vraiment bien.

― C’est déplacé, Naël. Vu que notre belle blonde a parlé des amants du sénateur, je pense plus prosaïquement à un accord gagnant-gagnant, comme diraient certains jeunes.

Ils continuèrent leur route à travers les lasers, les zones sombres pleines de corps embrumés et les éclaircies éblouissantes de couleur. Naël avait l’impression que la configuration du satellite avait été modifié par un sorcier allumé pendant la nuit et tous deux continuèrent leur chemin, en suivant la direction du soleil qui avait fini de se lever. Naël espérait que celui-ci n’avait la même gueule de bois que les êtres titubants qu’ils croisaient.

Ils arrivèrent enfin à l’astroport et retrouvèrent leur vieil ami de métal, qui avait toujours aussi belle allure malgré les années de service. Quand ils entrèrent dans le navire, ils furent accueillis par les voix excitées des hommes empilés sur le pont.

― Oï, cap’taine, Artur, on attendait plus que vous, les interpella Issam, on devrait filer fissa.

― Qu’est-ce qui se passe ? demanda Naël.

― C’est plus simple de voir directement avec ta petite protégée. Je fais partir le vaisseau. Allez, les gars, tous en poste !

Et le pilote s’éloigna en courant.

― Elle est où ? beugla Naël.

― En cellule, cap’taine, répondit Linor. Elle a frappé un gars. On était quatre pour l’arrêter, mais je crois que c’était trop tard. Il bougeait plus.

Le petit avait encore les yeux écarquillés de choc. Vu la gueule des autres gaillards, ç’avait dû être très moche. Vraiment très moche. Et la loi était on ne pouvait plus claire : les forces dirigeantes du satellite pouvaient faire appel à la guilde des mercenaires pour les intercepter. Il ne manquait plus que ça. Rien ne valait des mercenaires pour égayer un voyage. Naël se remémora sa dernière rencontre avec ces soudards. Elle s’était terminée par une jolie explosion de temple sacré, forcément sacré, et une interdiction de retourner sur une planète bigote sous peine de finir vivant en enfer. Ça ne le tentait pas trop l’enfer, mais c’était mieux que la mort, surtout si elle s’annonçait longue et douloureuse comme lui avaient promis certaines vieilles connaissances de la guilde.