Avertissement : dépression, idées noires

Cette année, j’aurais dû partir en Bretagne. Le parcours était prêt, les camping réservés tout comme l’hôtel et les billets achetés.

Sauf que, eh ! bien, en Bretagne, il pleut et que la tente sous la pluie, c’est pas trop mon truc.

Changement de programme une semaine avant le grand départ. Après quelques recherches (non, la GR au-dessus des gorges du Verdon n’est pas pour moi…), j’arrête ma décision sur le tour du Larzac et ses châteaux de templiers.

Comme un des gîtes de la GR est plein, je ne me débines pas et choisis de me rabattre sur la GR 71C en quatre étapes :

  1. Millau → Eco-camping du Cun : 18 km
  2. Eco-camping → Nant : 26 kms
  3. Nant → La Couvertoirade : 18 km
  4. La Couvertoirade → L’Hospitalet-du-Larzac : 18km. Contrairement au tracé officiel, je m’arrête plus tôt que la Cavalerie, car cette dernière n’a pas de camping et ça m’aurait bien ajouté 10-12 kms de marche

Au niveau matériel, ma liste a encore évolué par rapport à l’année dernière :

  • Sac à dos morphologie « femmes » 45 L + 10 L
  • Tente bivouac une personne
  • Une couverture de survie
  • Sac de couchage 15°C
  • Matelas de sol
  • Une paire toute neuve de bâtons
  • Brosse à dent, dentifrice, mini flacon de gel douche
  • Serviette microfibre
  • Polaire
  • Veste de pluie
  • Foulard
  • 2 t-shirts en fibre synthétique
  • 2 culottes et 1 brassière en laine de Mérinos
  • 1 pantalon et 1 short
  • 2 paires de chaussettes de marche
  • Maillot de bain
  • T-shirt et collant pour dormir
  • Paire de tongs
  • Paire de chaussures de marche
  • Chapeau, lunettes, crème solaire
  • Popote, gaz, brûleur, brique, opinel
  • 1 gourde de 600 mL, 1 bouteille en plastique 1L et 1 bouteille en plastique de 1,25L
  • 3 paquets de nouilles
  • Gâteaux, pâtes d’amande et fruits secs salés
  • PQ
  • Ficelle, pince à linge
  • Frontale
  • Portable avec trace GPS, chargeur plus batterie externe
  • Médicaments
  • Trousse de secours
  • Lacrymo
  • Tote bag
  • Porte-feuille
  • Livre

Tous mes habits étaient rangés dans des sacs plastiques entourés d’élastiques pour en réduire le volume. Le tout devait faire dans les 12kgs, un peu au-dessous du poids maximum recommandé.

On remarquera l’absence non-voulue de sacs poubelle et – surtout – d’élastiques supplémentaires.

C’est donc gonflé à bloc que je pars pour Millau.

Petit truc et astuce avant de continuer : les bus régionaux sont vraiment pas chers, donc si on a le temps, ça peut valoir le coup. Dans mon cas, le bus Montpellier – Millau ne m’a coûté que 2 euros mais avec une plus grande flexibilité par rapport au train.

J’arrive à Millau en au milieu d’après-midi. La ville est jolie, avec encore des bâtiments médiévaux. Le soir, un marché de producteurs proposent des plats de fastfood et boissons. Pour moi, ce sera aligot et glace au lait de brebis au bord du Tarn. En bref, une soirée très chill.

Le départ l’est moins. Je mets deux heures à refermer mon sac, insatisfaite de son équilibre. En pleurant à chaudes larmes, je pars et je refais mon sac deux fois dans les deux premiers kilomètres. Les idées noires commencent à apparaître, les gestes d’auto-agressions aussi, mais, comme ce serait pire si je faisais demi-tour, je me force à avancer.

Vous trouvez ça irrationnel et disproportionné pour juste un problème de sac ? Oui, ça l’est. Bienvenue dans mon cerveau.

Au milieu de la montée, une illumination me vient ; le sac est déséquilibré à cause des bouteilles d’eau ! Bref. Je continue mon bonhomme de chemin, croise deux chèvres snobs et traverse des prés aux herbes dorées pour arriver, sans difficulté, à ma première étape. Des chenilles se balancent au bout leur fil, mais rien d’invasif et je plante ma tente sous une éclaircie de pins.

Photo d'un poteau de clôture avec les marques rouges et blanches indiquant un parcours de grande randonnée.
En fond, on devine le viaduc de Millau en arrière plan
Photo de deux chèvres sur la base d'une croix en fer au bord de la falaise

Le lendemain, mon contentement perdure le matin avec un superbe petit déjeuner, qui valait bien ses huit euros. Mais voilà, quand il est l’heure de partir, de nouveau le drame. Deux heures pour finir mon sac. Pleurs, idées noires, puis l’humeur remonte avec le temps.

Cette étape a été la pire, non pas à cause du parcours ni du kilométrage, que j’enquille à ma grande satisfaction correctement, mais à cause des chenilles. Il y avait des signes avant-coureurs, mais là, il y en a partout.

Plein de chenilles. Sous. Chaque. F*cking. Arbre.

Dans un parcours grandement boisé. Des milliers de chenilles qui pendouillent à leur fil devant et au-dessus de moi.

Jolie, non ? (photographie de Didier Descouens, vue sur la page Wikipedia du papillon en question)

Toutes ces chenilles, mais sans réelle récompense, les points de vue étant (pour ma part) bof. J’arrive au camping et je pars visiter le centre Nant en *tongs*. Ne pas tenter quand la distance est de plus de 2kms aller-retours. La soirée se finit au restaurant du camping avec une salade guère bonne et vraiment chère, et je retrouve deux chenilles dans mon sac.

Le lendemain, rebelote. Sac, pleurs, idées noires et ça remonte le long de la journée.

Le parcours n’a rien d’intéressant, mais au moins, il n’y a plus de chenilles. Après un picnic avec vue sur les murailles de la Couvertoirade, je décide d’aller déposer mes affaires au gîte.

Photo de murailles au milieu d'arbres. Ciel très bleu. A droite, au loin, on voit un grand moulin

Déjà, angoisse, je partage la chambre avec un groupe d’hommes. Je le savais mais le constater pour de vrai rend la réalité palpable. Comme j’ai entendu beaucoup d’histoires au sujet des punaises de lit, je décide en l’absence du propriétaire d’inspecter les matelas. Et là, je trouve des incestes rouges-bruns écrasés sous le matelas.

Branle-bas de combat, demi-tour toute.

Après réflexion, je ne suis pas certaine qu’il s’agissait bien de punaises mais aucune envie de tester.

Donc, je me retrouve à 15h à la Couvertoirade, sans gîte, avec une visite guidée dans deux heures et à huit kilomètres du plus proche camping.

Après un calcul rapide, je trouve la solution : ce sera bivouac !

Je cache mon sac dans les bois et je repars direction le village. Très chouette visite, où j’apprends que les murailles qui ceignent le village ont été construites par la guilde des chevaliers de Malte (ou chevaliers-hospitaliers) et avait un rôle non pas défensif mais d’épouvantails auprès des bandes de brigands pour qu’elles n’attaquent pas. Peu à voir, donc, avec les templiers… La boutique ésotérique, où livres sur les templiers côtoient ceux sur les franc-maçons et d’autres new age, n’a clairement pas suivie la visite.

L’humeur est au vert après de très bonnes crêpes accompagnées de cidre et c’est satisfaite que j’installe ma tente. La proximité avec le village me stresse, je sors mon opinel et je profite des constellations qui apparaissent.

Photo du moulin de la Couvertoirade d'en dessous, avec une lumière dorée

Le lendemain, rebelote. Sac, pleurs, idées noires.

L’humeur remonte un peu avec la marche mais le chemin est inintéressant et long. Très très long.

Photo d'un chemin forestier en ligne droite. C'est long.
C’est long
Photo d'un pont d'autoroute. C'est toujours long.
Très looooong

Le camping d’arrivée, au bord de l’autoroute, est bof ; la piscine municipale aussi. Cependant, une découverte m’a fait oublier tout le reste : le musée archéologique de L’Hospitalet-du-Larzac. Il s’agit d’un petit musée non professionnel, tenue par le club local d’archéologie. En effet, quarante ans auparavant, un emplacement gallo-romain a été découvert à quelques kilomètres de là, dont les plus belles pièces sont exposées à Millau, et qui a été fouillé par des bénévoles. Le musée est tenue par un monsieur qui a participé aux fouilles, un réel puits de savoir et très généreux de le partage de sa passion. Je crois que j’aurai aimé visiter un tel musée quand j’étais petite.

Le lendemain, de nouveau le drame. Au sac que je mets du temps à fermer, s’ajoute la frustration de ne pas avoir passé plus de temps au musée. C’est donc les larmes aux yeux que je quitte le village direction Montpellier.

(Oui, oui, c’est toujours disproportionné)

A Montpellier, mon humeur remonte encore ! Déambulation dans la ville, concert d’orgue (!!) et bière et pizza au talon. Parfait !

Photo d'un demi de blonde avec trois parts carrés de pizza

Mais, patatras arrivée en gare : le départ de mon train se trouve dans la gare TGV ! Franchement, ces gares excentrées devraient avoir des noms éloignées de celles du centre-ville. Bref.

Donc là, je m’effondre sur le parvis de la gare, pleurs, idées noires et, bien sûr, sans mouchoir. Un vrai drama.

Irrationnel et disproportionné ? Eh ! Oui…

Je passe les détails et l’heure ridicule au possible qui a suivi, à part pour dire que j’ai réussi à obtenir une place chère dans un blablacar et, parce que sinon ce n’était pas drôle, ma place se trouvait juste devant deux gars s’échangeant des conseils de pickup artists.

***

Tout ce qui m’est arrivé est commun : la difficulté de fermer son sac, trouver le bon équilibre et les erreurs de gare. Mais, dans ma tête, tout était de ma faute car je me trouvais tellement nulle que je ne méritais pas d’y arriver et que de toute façon tout moment positif serait contre-balancé par un truc horrible (oui oui…). Et dans ce cas, à quoi bon ?

C’est faux, bien sûr, mais je n’arrivais pas à relativiser et c’est encore difficile de le faire maintenant.

***

En conclusion, une randonnée bof avec une variation très importante d’humeur ayant un réel impact sur mes journées, des milliers de chenilles, mais aussi avec des choses positives : Millau, La Couvertoirade, le musée archéologique de L’Hospitalet-du-Larzac et Montpellier.

Si vous passez dans ce coin du Larzac, je vous conseille la voiture et, surtout, arrêtez vous au musée de L’Hospitalet-du-Larzac (encore plus si vous avez des enfants rêvant d’être archéologues).